La Journée de la Laïcité se tient chaque année le 09 décembre en France.
Des événements se tiendront aujourd’hui en ministères, dans les collectivités, les universités, les écoles, les associations… pour sensibiliser, informer toutes les générations sur le sujet.
- L’objectif ? Fédérer pour le bien commun. Et c’est très bien.
- Cela suffit-il ? Les faits prouvent que non : harcèlements dans les écoles, sur les réseaux sociaux…
Alors je m’interroge.
De confession chrétienne, aucune gêne à le mentionner, je suis ouverte aux autres confessions, sachant que chacune a ses atouts et probablement ses fragilités.
Je pense que la tolérance passe par la vraie compréhension des choses et rien de mieux que de s’informer à la source. Cela passe par le soin de lire les écrits : la Bible, le Coran, la Torah… et de prendre le temps d’assimiler, le temps des échanges. C’est ce que j’ai fait, jeune, et qui m’a permis de m’ouvrir au monde, voyager et de prendre de la hauteur.
D’autres méthodes se développent que je vous partage.
Aujourd’hui je suis avec M. Xavier GUÉZOU, délégué général de l’Institut des Hautes Études de la Laïcité et du Monde Religieux qui nous ouvre ses portes.
Bonjour Xavier, tout d’abord je vous remercie du temps accordé. Nous sommes à l’IHELMR à Paris. Quel est l’objet précis de l’Institut ?
Merci d’avoir poussé nos portes Miss Konfidentielle en particulier à l’occasion de cette journée du 09 décembre puisque nous sommes déjà au cœur de nos sujets.
En effet l’Institut des Hautes études de la Laïcité et du Monde Religieux a pour objet la formation des hauts fonctionnaires, des cadres et dirigeants du privé libéral et associatif sur trois aspects fondamentaux : la laïcité, le fait religieux, les actions et la politique de l’État sur ces sujets.
L’Institut est créé en 2013 car plusieurs constats s’imposaient :
- La société française est très sécularisée ce qui a produit d’excellente chose mais aussi une méconnaissance des religions et paradoxalement de la laïcité.
- Dans le même temps le pays à vécu un changement sociologique majeur avec la décroissance de la pratique catholique et l’émergence de nouvelles religions, en particulier l’islam et les églises évangéliques.
- Enfin nous avons une histoire blessée dans le rapport au religieux et avons une pente « naturelle » à ne pas se préoccuper ou ignorer le fait religieux, parfois même sous prétexte de laïcité, or ne pas prendre en compte cette réalité peut-être problématique.
Éducation, culture, question de la violence et de la radicalisation, ethos démocratique, identité, histoire nationale, citoyenneté, intégration, histoire des idées, liberté et respect des convictions, fraternité et égalité … : tous ces champs touchent à la laïcité et sont concernés par le fait religieux pas uniquement bien sûr mais significativement.
Or il n’existait pas de formation dans un format adapté pour les professionnels. L’Institut a donc été créé en réponse à ces constats et problématiques afin de doter les acteurs de l’État comme du privé d’un socle de référence solide, commun, fiable sur des matières particulièrement sensibles, vives, manipulables.
Nous avons choisi le modèle de l’IHEDN qui a largement fait ses preuves comme formation d’excellence, apportant le bon niveau de synthèse et permettant également de casser les silos professionnels et créer des synergies : il s’agit de relier les intelligences comme nous aimons le dire dans le réseau des IHE auquel nous participons activement.
L’IHELMR a quel statut et de qui dépend- t-il ?
Je vais d’abord répondre à la seconde partie.
Notre gouvernance est en cohérence avec nos missions :
- le ministère de l’Intérieur a un rôle important chez nous pour tout ce qui concerne la laïcité et les actions et la politique de l’État, c’est essentiellement le Bureau Central des Cultes et le Bureau de la Laïcité qui sont actifs, ils siègent dans notre conseil d’orientation.
- les 6 cultes connus par l’État (et non pas reconnus) siègent également dans notre Conseil d’Orientation.
- Enfin un Conseil Scientifique réunissant des universitaires intervient lui pour conforter les contenus et nous éclairer sur l’état de la recherche sur nos sujets.
De notre gouvernance découlent nos statuts : comme elle réunit des représentants de l’État, des cultes, des universitaires, des professionnels, la forme associative loi 1901 a été retenue : suffisamment souple pour que chacun puisse participer tout en restant strictement sur son périmètre et sans but lucratif : nous assurons une mission de service publique.
Comment l’Institut est-t-il financé ?
Les parties prenantes de l’Institut (État et cultes) participent évidemment à notre budget annuel puisque c’est leur institut, nous perdrions toute crédibilité sans cela.
Également nous bénéficions de quelques dons, c’est la part la plus faible et clairement un axe de progrès.
Mais notre première ressource – soit environ 70 % de notre budget annuel – provient des frais de formations puisque nous sommes organisme de formation certifié Qualiopi (et si tout va bien nous serons au Répertoire Spécifique des Compétences en 2026).
Comment s’organisent les formations de l’IHELMR ?
Nous avons à ce stade deux grands types de formations.
Des formations courtes « intra » pour répondre à des besoins spécifiques des professionnels : fait religieux au travail, fait religieux en France, laïcité, formation sur tel ou tel culte, conseil et accompagnement aux entreprises et collectifs de travail…
Une formation longue de 140 heures : la session « Religions laïcité et enjeux contemporains » inspirée de la session nationale IHEDN évoquée plus haut, qui se déroule de septembre à juin ce qui est compatible avec à la fois un activité professionnelle très dense et la vie familiale.
Concrètement :
- les conférences se déroulent tous les mardis soirs en présentiel et visio.
- Un atelier pratique se tient une fois par mois où l’on embarque les auditeurs et auditrices dans un lieu témoignant de la façon dont se vit la laïcité, ou une religion,
Et puis deux ateliers longs se déroulent à l’étranger puisque le fait religieux, les religions sont bien sûr « internationales ». C’est par ailleurs, le moyen de découvrir les actions de la diplomatie française et des enjeux et défis auxquels le pays doit répondre..
Parlons de vous – Quelles sont vos missions dans le cadre de l’IHELMR ?
Je suis le délégué général de l’Institut, également une des personnes à l’initiative de la création de l’Institut et j’agis sous le contrôle et par délégation de notre gouvernance, en particulier notre Conseil d’Administration.
Je dois d’abord de veiller à ce que les équilibres des contenus de formation soient respectés entre l’Etat, le privé, les cultes, les intervenants universitaires.
Je suis garant des équilibres et également garant de la qualité de la formation qui est dispensée aux auditrices et aux auditeurs, ainsi nous avons mis en place un processus d’amélioration continue.
Un institut en bonne santé c’est un institut qui respecte ses partenaires et ils sont pour nous essentiels : ministère de l’Intérieur, ministère de la Justice, ministères de l’Europe et des Affaires Étrangères, ministère des Armées, Sénat, Assemblée Nationale, Medef, etc… : nos formations répondent à leurs besoins, je dois donc soigner ce lien de partenariat qui nous unis, vérifier que nous répondons à leurs attentes, ajuster l’offre, etc. : c’est tout à fait essentiel.
Notre institut est respecté car fiable et sérieux mais encore jeune : nos marges de progrès et de développement sont importantes. Aussi, avec l’équipe, nous travaillons en lien étroit avec le Conseil d’Administration et son Président Patrick Butor pour développer nos actions de communications et de nouveaux projets et développements.
Formidable ! Pour les auditrices et auditeurs intéressés par les formations de l’IHELMR, quelles sont les procédures à suivre pour l’inscription ?
Il faut être vigilant en mars car l’appel à candidature paraît à ce moment là. Si vous travaillez dans une structure partenaire de l’IHELMR, la sélection sera interne à votre structure (donc l’appel à candidature est émis par vos RH). Dans l’autre cas, il faut retirer un dossier chez nous et bien sur valider la démarche auprès de votre employeur afin que les frais de formation soient pris en charge. A partir de 2026 vous pourrez activer votre compte personnel de formation (CPF).
Les dossiers reçus font l’objet d’une première sélection qui donne lieu à un entretien.
Parcours, motivation, cohérence et esprit de la démarche, apports concrets possibles de la formation pour la personne sont les critères permettant de retenir ou non un/une candidate (autant de femmes que d’hommes chez nous ! ).
Pour une candidature reçue en mars/avril, votre sélection est confirmée ou pas fin juin début juillet.
Je fais une diversion en évoquant le sujet des sectes. J’ai été amenée à suivre de près les travaux de la MIVILUDES alors que son chef était M. Donatien le VAILLANT (articles) de 2023 à 2025. Un vrai sujet qui mérite toute notre attention. Est-il traité dans le cadre de vos formations ?
A l’IHELMR nous traitons la laïcité et le fait religieux dans toutes leurs dimensions : les fondamentaux, les points positifs, les problèmes et dérives.
Et bien sûr, le phénomène des dérives sectaires est abordé puisque l’État est acteur (et heureusement !) sur ce sujet notamment sur la partie signalement, pour aider les personnes victimes, les familles, et toutes les associations qui font un travail formidable.
Sont aussi abordés la question de la violence et des radicalisations violentes, l’accompagnement de la jeunesse, la formation des acteurs de l’ État, les relations auprès des cultes sur les champs régaliens, les enjeux diplomatiques, … : il est essentiel que les auditeurs aient une compréhension claire de l’ensemble des actions de l’État sur tous ces sujets.
Nous sommes en fin d’année 2025 – A vous écouter, votre Bilan est positif.
Je pense que nous sommes en ligne avec notre plan de développement même si les choses se font lentement.
Aujourd’hui l’Institut est reconnu par des ministères qui font appel à ses services comme un opérateur pertinent, voire incontournable sur nos sujets.
Nous avons des partenariats fidèles et solides : ministères régaliens, parlement…
Nous sommes pleinement reconnus comme IHE au côté d’Instituts plus prestigieux, c’est là aussi une belle reconnaissance.
Autre point de satisfaction : le réseau des auditeurs de l’Institut est structuré et actif à travers l’Association des Auditeurs et sa très dynamique présidente Domitille ARRIVET : ils font des choses formidables et ils restent en lien entre eux, c’est bien qu’il se vit des choses très positives dans nos sessions.
Enfin les perspectives sont très bonnes en terme de partenariats et d’offres : nous avons une projet qui va aboutir en 2026 avec un des acteurs clé de la formation professionnelle continue et nous travaillons avec l’IHEMI et l’IHEST, le premier notamment pour lancer notre offre de formation jeune, le second très exigeant sur le plan de la rigueur scientifique pour être encore meilleur sur le plan pédagogique et sur la transmission de compétences. Tout cela va dans le bon sens et est très précieux pour nous.
Enfin, à moyen terme, des offres en région voir à l’étranger sont également envisagées : c’est extrêmement motivant et enthousiasmant pour l’équipe opérationnelle et pour notre gouvernance.
Fort de vos expertises et réseaux – intervenez-vous dans les grandes écoles, les universités pour partager au plus grand nombre, et surtout les jeunes ?
Vous avez raison de parler des jeunes, c’est tout à fait essentiel et critique de bien répondre à leurs attentes : ce sont eux la nation de demain et comment faire nation si chacun est recroquevillé dans un communautarisme par exemple religieux ? Comment chacun peut développer sa singularité en partageant des valeurs communes nationale ?
Or les signaux qui remontent de l’éducation Nationale mais aussi des acteurs associatifs et même religieux ne sont pas très bons : on ne peut pas rester sans rien faire ni se planquer derrière un/des programmes de formation sur la laïcité, ce n’est pas respecter leurs questionnement, leurs aspirations à une société juste fraternelle libre.
Depuis 2024, nous avons engagé une réflexion avec notre gouvernance et avons muris un programme, en lien avec l’IHEMI qui sera probablement lancé en juillet 2026 très probablement sur Paris ou Région Paris selon les retours des collectivités locales.
Il est essentiel de repartir des aspirations des jeunes et de notre histoire nationale et européenne pour les faire converger et adhérer à nos valeurs de liberté, fraternité égalité à la fois constitutives de notre socle Républicain et universelles : les principes de la laïcité qui soutiennent et permettent ces valeurs deviennent alors bien plus acceptables et intégrés.
C’est pour nous, je le répète, tout à fait essentiel.
En guise de conclusion de ce premier éclairage de l’IHELMR, cela donne très envie d’assister à l’une de vos conférences pour témoigner de l’intérieur.
Chère miss K, soyez certaine que nous vous attendons et vous recevrons avec un immense plaisir !




