Le 22 juillet 2024 – De passage à Bordeaux, j’ai eu la joie de visiter l’Hôtel de Police grâce à Gérald DUPUY, policier aux frontières. Le plaisir surtout de rencontrer Jean-Cyrille REYMOND, Directeur Zonal de la Police Nationale (DZPN), préfigurateur pour la zone sud-ouest, lors d’une journée à l’agenda contraint. Le souvenir d’échanges sympathiques et instructifs à la bonne compréhension de l’évolution de la Police Nationale.
Bonjour Jean-Cyrille,
Quelles sont vos missions depuis votre prise de fonctions de DZPN Sud-Ouest ?
J’ai pris mes fonctions de préfigurateur au poste de directeur zonal de la police nationale sud-ouest le 15 mai 2023.
Ma mission était de mettre en place la réforme de la police sur la zone sud-ouest, qui correspond à la région Nouvelle-Aquitaine.
La réforme consiste à rassembler sous un même commandement les différentes filières de la Police Nationale (sécurité publique, police judiciaire, police aux frontières, renseignement territorial et formation), sur trois niveaux territoriaux. Au niveau national : le directeur général de la Police Nationale ; au niveau zonal : le directeur zonal de la Police Nationale ; au niveau départemental : le directeur départemental ou interdépartemental de la Police Nationale.
Quel est l’objectif ? L’objectif de la réforme est de donner l’autorité sur toutes les filières au responsable territorial afin de décloisonner les filières entre elles, et ainsi de donner une meilleure cohérence, une réelle symbiose et une meilleure coordination entre les différentes filières afin de mieux répondre aux besoins de la population en matière de sécurité, et de mieux lutter contre la délinquance. Il y a également dans la réforme de la police, un objectif de déconcentration, notamment au niveau zonal, afin d’animer, d’orienter, de coordonner et de contrôler en proximité l’action et l’activité des départements de la zone.
Quel était votre rôle ? Les premiers mois après ma nomination m’ont permis de poser les bases de la réforme au niveau zonal et départemental.
Nous avons constitué des groupes de travail au niveau zonal et départemental pour travailler sur l’organisation des différentes filières : sécurité publique, police judiciaire, police aux frontières, renseignement territorial et formation. Une équipe projet nationale était chargée de donner une cohérence entre le travail des six zones. Nous avons ainsi bâti les organigrammes missionnels pour chaque filière, ainsi que les structures transversales que sont les états-major, les services de soutien et le numérique. A peine plus de six mois après mon arrivée, la zone sud-ouest a été choisie pour être précurseure dans la mise en place de la réforme au 1er décembre 2023.
Aujourd’hui, sept mois après la mise en œuvre de la réforme, l’organisation policière a profondément changé. Les structures des états-major et du soutien des anciennes structures (SP, PJ, PAF…) ont fusionné au niveau zonal et départemental. Les filières, quant à elles, ont chacune gardé leur particularisme lié à leur mission, sous l’autorité d’un chef unique qui assure la cohérence d’ensemble de l’action de la police.
Et aujourd’hui ? Il conviendra maintenant de stabiliser et d’ancrer les nouvelles structures dans la durée. La préparation des Jeux Olympiques a nécessité une pleine implication de l’ensemble des services. Il convient maintenant de voir au-delà et de travailler sur les axes stratégiques qui sont les nôtres dans les différentes filières. C’est dorénavant la mission qui est la mienne, pour la zone sud-ouest et les 12 départements qui la composent.
Pourquoi ce choix de la Police Nationale ?
J’ai toujours été attiré par un métier au service des autres, dans l’armée ou la police.
Ce choix s’est confirmé durant mes études de droit. J’ai beaucoup aimé la matière pénale et le droit administratif. Je me suis donc naturellement dirigé vers la police et le concours de commissaire. Je n’ai jamais regretté ce choix.
Après deux ans d’école et d’alternance à l’école des commissaires de police de Saint-Cyr au Mont d’or, j’ai rejoint mon premier poste en tant que chef de la circonscription de police de Vernon dans l’Eure. Je souhaitais être responsable d’un commissariat.
Je me souviens, encore un peu étudiant dans ma tête, passer la porte de ce commissariat et voir les têtes interrogatives des policiers, face à ce nouveau jeune commissaire de 27 ans. Je me revois apprendre mon métier dans ce premier poste avec des collègues policiers dont l’âge moyen était plus proche de celui de mes parents que du mien…
J’ai ensuite pris la tête du commissariat d’Arpajon dans l’Essonne, puis de Gennevilliers et de Colombes dans les Hauts-de-Seine. Ces derniers postes dans des secteurs sensibles m’ont profondément marqué. La lutte de plusieurs semaines contre les émeutiers en 2005, avec mes collègues des Hauts-de-Seine a été un moment fort de ces années.
Qu’avez-vous apprécié dans ces postes ? J’ai beaucoup apprécié dans ces postes la position du commissaire de police : policier, tout d’abord, le jour ou la nuit, dans les cités, sur le terrain, avec ses hommes, au contact direct de la délinquance, du trafic de drogue et de l’ordre public. On se retrouve ensuite en costume cravate, en tant que haut fonctionnaire, auprès du maire ou du préfet dans des réunions sécurité. Il n’y a que ce métier qui permette de toucher ces deux extrêmes, d’être un policier comme les autres, et en même temps de pouvoir influer sur le cours des choses au regard de notre positionnement.
Quelle est la suite ? J’ai ensuite passé deux ans à Paris, occupant les postes d’adjoint au commissariat du 11e puis du 16e arrondissement, avant d’être muté, en urgence à Sarcelles. C’était juste après les émeutes de Villiers-le-Bel et le lynchage de mon prédécesseur. Cela a été une autre période marquante de ma vie professionnelle, à savoir restaurer l’ordre et la sécurité dans ces secteurs compliqués qu’étaient Sarcelles et Villiers-le-Bel. Je connaissais par cœur chaque recoin de ces cités pour y avoir patrouillé d’innombrables heures.
J’ai par la suite rejoint la direction centrale de la sécurité publique, au poste de chef de la division de l’ordre public, avant de partir à Marseille, en tant que chef d’état-major de la DDSP. La ville de Marseille m’a marqué. J’ai eu le coup de cœur pour cette ville et cette région. L’activité policière était sans fin. Entre la délinquance, les règlements de compte, les quartiers nord, les matchs au stade vélodrome, l’ordre public dans la rue ou au port, les voyages officiels ou les grands événements, cette ville est fascinante.
J’ai ensuite pris mon premier poste de directeur départemental de la sécurité publique à Chambéry, en Savoie. J’y ai découvert cette fonction de directeur. J’ai aussi eu à y gérer les gilets jaunes, samedi après samedi. Puis j’ai été appelé au poste de sous-directeur des missions de sécurité lors de mon deuxième passage à la direction centrale de la sécurité publique. Cela m’a permis d’imprimer des réformes structurantes comme la réorganisation des services de sécurité publique ou la sécurité du quotidien. Je suis ensuite parti à Toulouse, où j’ai pris les fonctions de directeur départemental de la sécurité publique de cette grande ville difficile, tant au niveau de l’ordre public que de la délinquance.
Le point commun de tous ces postes, de Vernon à Toulouse, a été de pouvoir peser sur la sécurité, en tant que chef de police.
Nous vivons une période complexe, souhaitez-vous transmettre des messages ?
Le message est qu’il faut toujours espérer, toujours croire en soi et dans ce que l’on fait pour entraîner les autres, et aboutir à améliorer le quotidien de nos concitoyens en matière de sécurité. J’ai toujours préféré être là où se passent les choses, notamment en matière d’ordre public, pour mieux agir sur elles.
Je tiens à remercier Jean-Marie SALANOVA, ancien directeur central de la sécurité publique, qui m’a marqué par sa façon d’appréhender les problématiques, ainsi que par sa pensée et son action structurante.
Je souhaite remercier également Frédéric VEAUX, le directeur général de la police nationale, qui a cru en moi pour devenir directeur zonal de la Police Nationale, et qui contre vents et marées, a réussi à réorganiser et transformer la police grâce à son action déterminée.
“Être là où se passent les choses ” est passionnant. Que vous manque t-il aujourd’hui ?
Ce qui me manque le plus, c’est le temps.
Le temps passé en famille, avec des amis, à lire ou me promener. Je suis adepte de marche, de randonnée, de vélo, de plongée sous-marine et de tir sportif.
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