Souvenez-vous ! Le 13 juillet 2023, je publiais l’interview du général Charles-Antoine THOMAS, commandant la Garde républicaine.
Une année plus tard… le 12 juillet 2024, je mets en lumière la générale Frédérique COURTET NOURDIN, commandant en second la Garde républicaine. Nous sommes au Quartier des Célestins, situé à deux pas de la place de la Bastille à Paris.
Bonjour générale, nous allons évoquer votre parcours avec un parallèle entre votre parcours de femme et votre parcours professionnel qui arrive bientôt à sa fin. De fait nous allons proposer aux lecteurs un joli bilan de votre chemin de vie. En premier lieu, j’aimerais découvrir vos origines.
Je suis née à Épinal dans les Vosges, un département français de la région Grand Est qui a été soumis à des vagues déferlantes en périodes de guerre.
Dans ma famille, il y avait deux origines sociales, les propriétaires terriens d’un côté et le monde de l’industrie de l’autre. Mon père avait des difficultés à trouver du travail à l’après-guerre et c’est le premier à avoir intégré la gendarmerie. Il a été suivi par deux autres de ses frères, et un troisième frère est devenu militaire. Le pli était pris, d’autres allaient suivre.
Je suis issue d’une fratrie de trois enfants dont l’enfance a été ponctuée par de nombreux déplacements pour suivre mon père au gré de ses affectations en France et à l’étranger. Nous avons vécu ce rythme de vie où l’on se réinstalle sans cesse dans un nouvel environnement avec de nouveaux camarades, de nouvelles relations. Et cette mobilité me plaisait. Ne serait-ce que de changer de maison, cela était quelque chose que j’affectionnais tout particulièrement. Pour finir, avec un modèle paternel fort en termes de valeurs, ma sœur aînée a embrassé plusieurs métiers dont celui d’infirmière militaire et mon frère est ingénieur dans l’armement. Une famille bien ancrée dans le milieu militaire.
Pour ma part, j’avais envie d’embrasser un métier qui bouge, qui a du sens, qui me permette de repartir régulièrement de zéro, idée de faire de nouvelles découvertes, de rencontrer de nouvelles personnes, de me remettre en question. J’ai réussi plusieurs concours de la fonction publique, j’ai choisi la gendarmerie.
Vous avez fait le choix de suivre quelles études supérieures ?
Mes études ont été un peu chaotiques, du moins au début. J’étais une très bonne élève jusqu’à mon arrivée sur Paris dans les années 80. On est passé de Berlin avec un rythme scolaire équilibré à la capitale avec ses élongations horaires, ce qui a été un énorme bouleversement.
J’ai obtenu mon bac et suis rentrée directement en gendarmerie en passant le premier concours ouvert aux femmes en 1983. Je n’attendais que cela !
J’ai intégré l’École des sous-officiers de la gendarmerie (ESOG) de Montluçon en août 1984. Par la suite, j’ai obtenu mes diplômes universitaires jusqu’à l’obtention d’un MBA en cours de carrière.
Comment les gendarmes vous ont-ils accueillie en 1985 en tant que gendarme féminin ?
Entre les mises en garde de nos instructeurs et la réalité du terrain, aucun rapport.
En école de gendarmerie notre encadrement nous disait : « Vous allez voir les filles, les anciens vont avoir du mal à vous accepter. C’est pas gagné. Vous allez bouleverser leur vie ! ».
Il nous a dressé une acceptation difficile des anciens et finalement, dans ma première brigade à Belfort en 1985, il s’est produit l’inverse. J’étais très bien avec les anciens. On faisait un véritable travail d’équipe. Ils arrivaient à la cinquantaine et étaient usés par le rythme de travail de l’époque. Je faisais tout pour les soulager. Je me sentais si bien dans mon unité que j’en ai oublié mes ambitions premières et j’ai dépassé avec sérénité le questionnement des plus jeunes qui étaient plutôt dubitatifs sur l’arrivée des femmes en gendarmerie : ils s’interrogeaient sur leur capacité à prendre ce métier à bras le corps mais aussi à évoluer au sein de l’institution.
Entre mythe et réalité, vos propos permettent la réflexion. Après cette première expérience à Belfort, quel a été votre déroulé de carrière en gendarmerie ?
Après cette première belle expérience, j’ai changé d’affectation pour des raisons personnelles et là, c’était plus difficile en raison d’une activité pas assez soutenue à mon goût.
En effet, je suis arrivée dans une petite brigade en Mayenne. J’avais pris un tel rythme de travail à Belfort, que je me suis retrouvée un peu perdue. Par ailleurs, je soulevais localement beaucoup d’interrogations sur mes intentions professionnelles, mes ambitions. J’avoue que j’ai rapidement répondu à un appel à volontaires pour rejoindre Paris. J’ai été affectée au Service d’information et de relations publiques (SIRPA) comme premier gendarme-rédacteur à Gend Info.
J’ai participé à l’élaboration de ce journal interne dans son nouveau format. Cela a été une bascule sur une nouvelle et belle expérience complètement atypique pour un sous-officier à l’époque. J’ai pu observer une évolution majeure dans la communication interne avec le tout début de la publication assistée par ordinateur et une nouvelle charte graphique. J’ai enchaîné les dossiers, et les articles. Le SIRPA m’a donné une vision de la gendarmerie. J’ai découvert l’institution à travers ses services et ses talents ; Que de rencontres humaines intéressantes. Donc c’était une expérience enrichissante.
Et puis rapidement, j’ai été rattrapée par mon envie de bouger, de faire autre chose. « Le SIRPA c’est bien, mais après ? ». Mon ambition est remontée à la surface : « et si je m’inscrivais au concours officier ? » Je suis descendue au secrétariat pour connaître la date d’inscription. Il me restait jusqu’au soir pour candidater. Drôle de coïncidence. En une heure, l’imprimé était rempli. J’avais pris une décision qui allait réorienter toute ma carrière et ma vie. Donc je me suis inscrite et j’ai été reçue au concours en 1993. J’ai suivi trois années de scolarité ce qui m’a donné notamment l’opportunité de passer une licence en droit.
A l’issue de ma scolarité, j’ai rejoint une Section de recherches (S.R.). J’ai touché le domaine de la police judiciaire que mon père affectionnait tout particulièrement. Il avait travaillé au sein de la Brigade de recherches (B.R.) d’Épinal. Il en était très fier. Donc un nouveau challenge puisque je n’avais jamais touché la police judiciaire de façon aussi poussée : comment procède-t-on pour les investigations ? comment se déroulent les écoutes ? comment chasse-t-on un délinquant ? comment l’identifier, le détecter, le suivre, et essayer de le piéger, l’interpeller ?
On est toujours dans le mouvement avec jamais deux journées qui se ressemblent. J’occupais le poste d’adjointe au commandant de la section de recherches de Lyon. J’y suis restée trois années puis un nouveau challenge s’est annoncé, un nouveau métier et cette fois-ci en lien avec le monde politique.
En 1999, j’ai été affectée comme commandant militaire en second de l’Hôtel de Matignon du temps du Premier ministre monsieur Lionel JOSPIN puis monsieur Jean-Pierre RAFFARIN. C’est une nouvelle bascule dans un milieu particulièrement sensible. Là, on touche au monde politique où tout est feutré, où on mesure ses paroles, où la discrétion est de mise. On doit répondre aux exigences et en même temps garder le fil de ce que nous devons être en termes de rigueur et d’esprit militaire. On ne doit pas perdre son âme. En définitive, il faut savoir être prudent et savoir bien doser ses paroles. Comment dire « non », comment aménager une réponse pour la rendre acceptable. Donc on apprend la subtilité. Cela a été une expérience de trois années.
Votre position de femme en gendarmerie et en milieu politique se poursuit-elle comme vous le souhaitez ?
Dans le milieu des officiers, j’ai vu une petite différence non pas en termes d’acceptabilité mais toujours ce questionnement que j’évoquais en début d’entretien.
Je pense que l’ambition d’une femme peut effrayer certains hommes non pas parce qu’elle est incapable de réussir, cela est acquis ! Mais parce que la femme a les capacités de réussir autant qu’un homme. On a toujours laissé entendre aux garçons que finalement tout reposait sur eux comme chefs de famille, comme protecteur financier de la famille… Ces schémas familiaux sont parfois encore présents. Constater qu’une femme peut réussir au même titre qu’un homme peut entraîner chez certains un sentiment de frustration ou une incompréhension parfois inconscientes. De même, chez les femmes, ils peuvent engendrer un manque de confiance en soi et un sentiment d’illégitimité qui les encouragent à s’autocensurer. Mais je ne jette la pierre à personne. Je pense que les choses se régularisent dans le temps ; je suis assez optimiste. Aujourd’hui, les femmes travaillent et c’est toute la sphère sociale qui s’adapte. Cela me rassure, on est vraiment dans le mouvement maintenant. Il faut juste s’accorder un peu de temps. Je pense aussi qu’il ne faut pas que les hommes et les femmes aient peur : c’est un équilibre à trouver.
Vous quittez le monde politique, quelle a été la suite de votre route ?
On m’a envoyée à Roissy, sur l’aéroport de Paris-Charles de Gaulle pour être commandant de compagnie pendant cinq ans.
Je suis arrivée un an après les attentats du 11 septembre à New-York avec toute la sûreté aéroportuaire à mettre en place. Cela a été une aventure folle parce qu’il fallait réfléchir à la sécurisation des sites, convaincre les partenaires d’investir dans des équipements coûteux.
A mon arrivée, avec mon équipe, nous avons rapidement soulevé des failles énormes parce qu’en réalité, tout était superficiel, tout était à faire. Il était urgent d’y remédier ! Notre action couvrait les aéroports de Roissy et du Bourget. Sur cette dernière plate-forme où l’aviation est un peu différente avec d’autres profils de passagers, le challenge était le même mais l’approche autre.
Dans ma démarche, j’étais très exigeante pour obtenir un minimum d’investissements. C’était l’idée et elle a été comprise. J’ai beaucoup aimé ce poste avec un vrai travail d’équipe sachant qu’à l’époque on n’avait pas tous les outils informatiques que l’on a aujourd’hui.
L’expérience aéroportuaire est dense. Comment composer avec votre vie de famille ?
Bonne question ! Il se trouve que je suis mariée à un officier de gendarmerie et à un moment donné il faut bien que l’on compose ensemble.
J’ai rencontré mon mari à l’École des officiers. Nous nous sommes mariés en 1996 et nous avons deux enfants. On n’avait jamais vraiment eu jusque-là le choix de nos affectations parce que l’on a toujours privilégié la vie commune. Dans notre esprit, on ne se mariait pas pour être célibataires géographiques. Donc lorsque j’étais à Matignon puis à Roissy, mon mari travaillait à la direction générale de la gendarmerie à Paris. Je suivais mon mari. Je comprenais cette priorité parce qu’il était issu d’un autre recrutement et était plus gradé que moi. Il avait une carrière à jouer aussi. A l’époque, on était dans les balbutiements dans la gestion des couples endogames. Une seule question à se poser, que privilégions-nous sachant que chacun veut suivre son parcours sans négliger pour autant la famille. Nous avons privilégié la vie commune.
Puis, nous avons quitté la région parisienne. Durant son temps de commandant de groupement à la Rochelle, j’ai occupé le poste de chef des ressources humaines au commandement des écoles à Rochefort.
Après avoir fait essentiellement de l’opérationnel, j’ai abordé le domaine du soutien et j’ai fait mes premiers pas dans le domaine de la gestion des personnels. J’accompagnais les écoles et je m’occupais, entre autres, des affectations entrantes et sortantes, de la préparation des avancements et de tous les actes de gestion ordinaire. Comme il s’agit de gérer à distance des personnes qui ne sont pas sous mes ordres directement, on est sur une gestion humaine « froide », un gage d’équité de traitement. Pour autant, l’intérêt du militaire n’était pas perdu de vue ce qui nous a permis de fermer quatre écoles dans de bonnes conditions. J’avais une belle équipe avec moi, très féminine d’ailleurs. C’était un travail passionnant branché sur des considérations humaines et professionnelles. Un objectif : faire concorder au mieux l’intérêt personnel avec celui de l’institution. On agit pour que les missions soient exécutées, pour que la gendarmerie soit au rendez-vous tout en permettant aux personnels de progresser et de s’épanouir dans leur métier.
Pendant cette période j’étais élue référente officiers. C’était étonnant parce que j’avais la « casquette RH » et la « casquette de représentante des officiers dans les écoles ».
Il était indispensable de faire la part de choses. Lorsqu’un officier m’appelait je demandais d’abord les raisons de son appel afin de définir à quel titre je devais lui répondre. Il en va de la relation de confiance avec la hiérarchie et les personnels que l’on représente. Il y avait cependant un avantage non négligeable : j’étais bien placée pour traiter leurs questions ou soumettre leurs préoccupations au commandement.
Le temps de commandement étant passé pour mon mari, nous sommes remontés sur Paris. Cette fois-ci, j’ai été secrétaire générale adjointe de la Fonction militaire de la gendarmerie (CFMG). Une fois de plus, une nouvelle expérience, celle de la concertation.
La gendarmerie n’est pas syndiquée… dès lors, comment faire entendre la parole des uns et des autres, comment construire un texte en associant les représentants des personnels ? Ma fonction auprès du secrétaire général ne se résumait pas à celle de « gentille organisatrice » de sessions. Nous devions accompagner, former, veiller à ce que les sessions répondent aux attentes des membres du conseil et aussi des personnels sur le terrain.
Cette expérience de concertation vous a-t-elle menée à un nouveau poste intéressant à la DGGN ?
L’expérience m’a conduite à deux postes successifs de chef de bureau à la Direction générale de la gendarmerie nationale (DGGN) dans la branche RH. Il y avait une certaine logique dans cette nouvelle phase de mon parcours.
Lors de mon passage au CFMG, j’ai été désignée référente égalité de la gendarmerie. Cela m’a permis de me poser, d’étudier les indicateurs, de réfléchir à la place de la femme au sein de la gendarmerie et de répondre aux attentes du DGGN, le général Denis FAVIER.
Dans le cadre de ma réflexion sur le harcèlement, le mal-être au travail, le directeur général m’avait demandé de travailler sur un plan d’action égalité-diversité. Mission réalisée avec un chargé de mission.
Durant ce mandat, j’ai proposé la création de la plate-forme STOP DISCRI afin de répondre au souhait du DG de libérer la parole des victimes. J’ai créé un groupe de travail et apporté cette proposition qui est aujourd’hui un site de signalements hébergé par l’inspection générale de la gendarmerie. Les victimes peuvent la saisir directement. Depuis, bien d’autres choses ont été mises en place dans le cadre notamment de l’égalité professionnelle et je m’en réjouis.
Cette fonction a été marquante pour moi, quelque peu compliquée mais tout autant passionnante.Travailler sur des situations de harcèlement ou de discrimination ne nécessite pas uniquement une écoute. Il faut évaluer la dénonciation puis la traiter. On ne peut pas laisser les gens en souffrance, on ne peut pas laisser les victimes hommes ou femmes sur le côté. Donc de vraies réponses ont été apportées. Reste la diffusion des modèles. Cela a été rapidement corrigé. Au moment d’être recruté ou formé, le candidat ou l’élève doit pouvoir évaluer son futur environnement et comprendre par exemple, que des femmes commandent en gendarmerie. Il est important de donner le ton dès le départ.
A l’issue de ces travaux, j’ai commandé le bureau de gestion du Corps de soutien administratif et technique de la gendarmerie (CSTAGN).
Ce sont des personnels de soutien militaire que j’ai gérés pendant deux années.
De nouveau, je me suis lancée dans une nouvelle réflexion : comment améliorer leur gestion ; comment les fidéliser. J’étais très attentive à ces hommes et ces femmes qui méritent toute notre attention.
Cela a été une belle expérience, écourtée parce que mon mari a pris le poste de mon chef. Et là, j’ai demandé un repositionnement. Pour moi, il était hors de question de servir sous ses ordres. « non ! Je ne veux pas obéir à mon mari ». Je blague. Je pense tout simplement qu’en termes de management et de vie de couple, c’est plus simple même si nous partageons une vision commune de la gestion. Ne mêlons pas nos vies privée et professionnelle. Cela a clairement été un sacrifice de quitter mon poste puisque je m’y sentais vraiment bien avec une équipe formidable et une autonomie certaine dans mes actes de gestion. Mais mon indépendance l’a emporté.
J’ai donc postulé pour le Bureau du recrutement concours examen que j’ai obtenu. Une mission particulièrement sensible et importante pour l’institution et pour notre jeunesse. On aborde le recrutement sous toutes ses dimensions, sécurité juridique, recrutement qualitatif et quantitatif, respect de la diversité, etc.
A mon arrivée, les procédures étaient trop lourdes. Je me suis fixé un nouvel enjeu, celui de la dématérialisation de certaines épreuves. Donc, avec mon équipe nous avons conduit cette modernisation avec beaucoup de détermination.
Cela était un risque à prendre et finalement nous avons réalisé la décentralisation et la dématérialisation des tests psycho-techniques qui accompagnent le recrutement. Cela a été un grand pas en avant et puis on a avancé sur d’autres projets : la correction des copies en ligne, le nouveau site de recrutement, le compte candidat, la réduction du concours SOG qui est passé d’une journée à une demi-journée. Cela a nécessité une remise en cause des process. J’ai pu compter sur une très bonne équipe de techniciens et de juristes. Mon engagement a été d’accompagner ce changement.
Durant mon temps au Bureau du recrutement concours examen, j’ai rejoint le Cycle des hautes études du ministère de l’intérieur (CHEMI) où j’ai retrouvé des camarades féminines du Cycle Ariane. C’est bien, on renoue avec les autres administrations et on élargit son regard avec un nouveau mémoire à travailler. Je me suis penchée sur un sujet interministériel qui m’a permis de faire de nombreuses et belles rencontres dans toute la sphère de la sécurité. A l’issue, j’ai été inscrite à la liste d’aptitude pour le grade de général. Je suis donc arrivée sur mon poste actuel avec les étoiles.
Vous passez générale avec des étoiles, félicitations. Quel est votre retour d’expérience à compter de cette étape ?
Cela a été un moment émouvant, important à partager en famille.
Lorsque je regarde ma carrière rétrospectivement, je me dis que la gendarmerie m’a énormément apporté en me permettant de multiplier mes expériences. « Quelle richesse cette mobilité fonctionnelle ! C’est un vrai cadeau ! ».
Si j’observe mon déroulement de carrière, j’ai évolué tout doucement mais sûrement au fil des affectations. Au résultat, je me suis lancée dans de nombreux projets très variés, je n’ai jamais fait deux fois la même chose, j’ai rencontré des personnes civiles et militaires de tous milieux. Certaines sont devenues des amis très proches. La somme de tout cela a contribué à développer ma reconnaissance pour l’institution que je sers et mon goût pour les relations humaines.
Si j’ai un message à faire passer aux plus jeunes ?
Ce serait celui-ci : « Bougez ! cherchez de nouvelles missions, accordez-vous cette mobilité fonctionnelle si enrichissante et à un moment donné, vous allez réaliser qu’elle vous construit, qu’elle vous permet de vous valoriser à vos propres yeux. L’Institution a également tout intérêt à ce que vous élargissiez vos expériences, que vous viviez pleinement vos affectations. Elle vous accompagnera. Elle a tout à gagner en pouvant compter sur des personnels densifiés et aguerris. Une nécessité au regard de la complexité de nos missions de service public dans un contexte de plus en plus sensible ».
Que dire de plus : arrivée au terme de ma carrière, je ne me suis pas trompée de métier et rien que cela. Il n’y a pas mieux ! Je fais partie des pionnières sous-officières puis officières. Le jeu en vaut la chandelle même si commander au féminin n’est pas toujours simple et ce n’est pas propre à la gendarmerie. On doit avoir du caractère et on doit apprendre à composer : une femme qui crie verse facilement dans les aigus et peut passer pour une « hystérique » au risque de perdre sa crédibilité. Il a fallu que je trouve des subtilités pour commander et cela s’est toujours bien passé d’autant que j’ai toujours veiller à l’équité, à l’égalité de traitement. Je pense qu’un acte de commandement doit rester cohérent, clair, expliqué, accompagné et à partir de là, il est compris et accepté s’il s’applique de façon équitable.
Notre entretien est passionnant. Vous êtes un bel exemple de réussite de gendarme au féminin. Des passions autres que la gendarmerie vous animent-elles ? Et surtout avez-vous du temps libre ?
Le temps libre, un grand sujet ! J’ai deux enfants dont un avec handicap. Donc, je ne vous cache pas que j’ai mis entre parenthèses tous mes loisirs pour l’accompagner. Les week-ends et les soirées étaient consacrés à ma famille. Mon fils est un jeune homme aujourd’hui qui va bien et qui force mon admiration comme ma fille, d’ailleurs, qui dû trouver sa place et dont je suis très fière.
Pour autant, je me suis accordé un peu de temps pour faire du sport. Un peu de natation et de footing pour trouver un temps pour moi. Il est vrai que j’ai renoncé à la peinture à l’huile me limitant à peindre rapidement quelques aquarelles par ci par là.
Mon vrai loisir, reste la lecture et je lis de tout. J’ai commencé par les classiques pour la plume et la bascule dans des sociétés éloignées de la nôtre. Aujourd’hui, je suis plutôt sur des romans, des polars et quelques documents sur des sujets d’actualité. En ce moment, je lis à la fois un ouvrage sur l’islamisme et un roman historique. Oui, il m’arrive de lire deux livres en même temps : je ne peux renoncer à la lecture-plaisir. J’ai besoin de mon échappée belle.

Note importante : il est strictement interdit de copier tout ou partie de l’article.