Charles Rennie Mackintosh, l’apôtre de l’Art nouveau à Glasgow
Véritable curiosité et institution à Glasgow, Mackintosh at the Willow est un bâtiment entièrement imaginé et conçu par Charles Rennie Mackintosh pour la femme d’affaires Kate Cranston. Créés en 1903, les salons de thé entièrement restaurés selon le style et les plans du célèbre architecte glaswégien ont rouvert leurs portes au public en juillet 2018.
En plein centre-ville de Glasgow, au 217 Sauchiehall Street, s’élève un magnifique témoignage de l’Art nouveau en Ecosse. Il s’agit des salons de thé, initialement conçus en 1903 par le fameux architecte Charles Rennie Mackintosh (1868-1929) pour Miss Kate Cranston. A l’époque, la femme d’affaires féministe voulait proposer des lieux de réunion innovants et raffinés aux habitants de la métropole industrielle. L’objectif était que les hommes et les femmes puissent se détendre dans des salles séparées et profiter de rafraîchissements non alcoolisés dans une multitude de pièces à la décoration avant-gardiste et rassemblées dans un même bâtiment. Fait remarquable pour l’époque, toutes les pièces disposaient de l’éclairage électrique dans une ville où seulement 2% de la population pouvaient en profiter. Principal représentant de l’école de Glasgow, qui a fortement influencé le mouvement Modern Style, pendant anglo-saxon du style Art nouveau, Mackintosh est désormais internationalement célébré pour ses nombreuses réalisations dans la ville. Il a notamment signé The Lighthouse (le phare) qui a abrité jusqu’en 1980, les anciens bureaux du quotidien Glasgow Herald. La Queen’s Cross Church, son seul lieu de culte, ou encore l’École d’art de Glasgow (Glasgow School of Art) qui est considérée comme son chef d’œuvre et qui a miraculeusement survécu à un incendie en 2014.
Un groupe d’artistes : The Four
Tout à la fois, architecte, peintre, désigner, sculpteur ou décorateur d’intérieur, Charles Rennie Mackintosh s’est fait connaître en formant au sein de l’École d’art de Glasgow à la toute fin du 19e siècle, un groupe d’artistes identifié sous le nom des quatre : « The Four » . Ce mouvement auquel appartenait sa future femme, Margaret Macdonald, mais aussi sa sœur Frances Macdonald et Herbert McNair, se prononcent bientôt contre les dérives de l’industrialisation triomphante. Profondément attaché à son pays, voire même nationaliste, Mackintosh considère que le style féodal écossais, non perverti par le néo-classicisme, représente une plus grande souplesse pour la construction d’édifices et la création de décors. A cette époque de transition entre l’ère victorienne, très exubérante, et l’ère moderne plutôt fonctionnaliste, il s’impose comme un pionnier du post-modernisme en se tenant farouchement à l’écart des grands courants stylistiques de son temps.
Précurseur du post-modernisme
A la fin du 19e siècle, l’Art Nouveau est à son apogée partout en Europe. Face aux foisonnements décoratifs notamment de l’Art Nouveau belge et français, certains pays ou groupes de créateurs réagissent et tendent à développer des formes plus géométriques à Vienne (Sécession), Munich (Bauhaus) ou Glasgow. A cet égard, la conception et l’aménagement des salons de thé de Kate Cranston constituent un modèle du genre. Ils s’inscrivent dans la tradition du mouvement Arts & Crafts littéralement « Arts et artisanats » né au Royaume-Uni dans les années 1860. En plus de la transformation complète du bâtiment initial, Mackintosh réalisa tout le mobilier qui était en chêne massif. Il a dessiné des tissus fabriqués à la main, aux motifs rose et larme, imaginé des meubles aux lignes simples, dépouillé des rembourrages et de la profusion de détails si chère à son époque. Du bois laissé naturel au début de sa carrière, le mobilier devient laqué blanc ponctué de quelques touches mauves, vertes ou argent pour le motif. La chaise à haut dossier avec la découpe ovale, la chaise à dossier courbe en petits bois et la chaise échelle, icônes aujourd’hui de la culture design, ont été élaborées pour les quatre salons de thé de la femme d’affaires visionnaire. Une ode à la sobriété qui s’inspire directement du japonisme. A la fin du 19e siècle, la cité industrielle entretenait des relations commerciales privilégiées avec l’empire du Soleil levant. Au même moment, Christopher Dresser un décorateur né à Glasgow, donnait des conférences sur l’art japonais. Mackintosh a certainement bénéficié de tous ces apports et il a intégré dans un certain nombre de ses projets les qualités fonctionnelles et les espaces fluides de l’architecture nippone, organisés selon le principe des partitions (Shinkabe). Pour ses intérieurs, il utilisera souvent des écrans ou des éléments de bois peint pour diviser l’espace.
Renaissance des salons de thé
Entièrement rénovés et rouverts au public en juillet 2018 pour marquer le 150e anniversaire de la naissance de Mackintosh, les visiteurs peuvent à nouveau déjeuner ou tout simplement prendre une tasse de thé dans les salons. Pour la petite histoire, The Willow Tea Room signifie la Maison de thé du saule, en référence au nom gaélique de l’avenue Sauchiehall où elle se trouve. Confortablement assis sur l’une des célèbres Willow Chairs, les chaises à dossier haut imaginées par le décorateur, les clients se délectent de pâtisseries typiquement britanniques, cakes, scones, shortbreads et autres brownies, dans de la fine porcelaine de Chine. A l’occasion de cette renaissance, plus de 420 meubles, (vitraux, verrerie, fer forgé et pièces de textiles), ont été commandés à des maîtres artisans, selon les conceptions originales et scrupuleusement conservées de l’artiste. Des visites guidées sont organisées pour les clients. Tout à côté, un centre d’accueil intégré au bâtiment propose un espace d’exposition interactif, racontant la collaboration entre l’architecte écossais, son épouse et la riche négociante et ses prolongements dans le patrimoine architectural contemporain de la ville. « Aujourd’hui les aînés reviennent parce qu’ils se souviennent du lieu quand ils étaient jeunes, les nouvelles générations le découvre parce qu’ils sont intéressés pas la démarche de Mackintosh et aussi parce que Kate Cranston était une chef d’entreprise très inspirée, dans un temps où il était difficile d’être une femme et de gagner de l’argent. Ce n’était pas l’argent de son mari. Elle a fait fortune par elle-même. Et si elle n’avait pas donné ce travail à Mackintosh, il n’aurait pas pu remporter d’autres contrats ou concours par la suite » souligne Jodie, la brillante jeune femme en charge de la visite guidée. Fidèle à sa vocation humaniste et philanthropique du départ, Mackintosh at the Willow, fonctionne comme une entreprise sociale. Sa finalité est d’offrir un large panel d’activités culturelles et conceptuelles, d’accueillir des événements et des conférences, de créer des emplois durables ou des possibilités de bénévolat sur des opérations de préservation du patrimoine.
Synthèse harmonieuse
En dehors de la visite des bâtiments de Glasgow qui ont fait sa renommée, il est possible d’appréhender une grande partie de l’univers de l’architecte et du créateur d’objets décoratifs, (vitrail, travaux sur papier, tissus, broderies, joaillerie, ferronnerie, argenterie, mobilier) au Kelvingrove Art Gallery and Museum. L’imposant bâtiment baroque de grès rouge abrite une collection de plus de 8000 pièces, dont le chef-d’œuvre de Salvador Dali le Christ de saint Jean de la Croix. Il présente également dans six espaces distincts la vie, les influences et les techniques de Charles Rennie Mackintosh, à travers plus de 250 objets qui lui sont attribués. Pour les inconditionnels, une de ses œuvres de jeunesse est encore visible dans la Nécropole, près de la cathédrale. Première commande du jeune designer, en 1888, un monument en mémoire du chef de la police de Glasgow, arbore au milieu des autres stèles granitiques, une croix de style celtique. Toute sa vie, Mackintosh a donc tenté de créer la synthèse entre le beau et l’utile. Il croyait fermement à l’unité organique totale, à savoir qu’une architecture et l’ensemble de ses éléments (lignes, masses, agencement intérieur, mobilier, décor, etc.) devaient être une synthèse harmonieuse entre l’esthétisme et le pragmatisme, entre la modernité et la tradition. Dans son œuvre, rien ne s’attache au superflu, car l’artifice aurait irrémédiablement entaché la beauté globale de ses créations. A l’image du slogan actuel de l’office de tourisme « People Make Glasgow », Charles Rennie Mackintosh a façonné avant l’heure, durablement et à sa manière, le paysage urbain de la capitale économique écossaise. Une visite de ses monuments ainsi que des magnifiques musées alentours, est un passage obligé pour tous les visiteurs et les amoureux de Glasgow.
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Mackintosh at the Willow
The Charles Rennie Mackintosh Society
Où dormir : Ibis Styles West est parfait pour tous les fans de musique et de rock. Les murs sont ornés des noms des stars qui ont fait les nuits légendaires de la ville, Texas, Travis, Belle and Sebastian and Primal Scream. La décoration du lobby décline ce thème et des concerts de musique live peuvent y être organisés.
Où manger : Vivez une véritable expérience gastronomique au Gannet (le fou de bassan en gaélique) ! Le Gannet est un restaurant maintes fois primé tenu par Séverine une française enthousiaste et dynamique installée au Royaume-Uni depuis de nombreuses années. Des produits écossais d’exception, agrémentés d’une merveilleuse carte des vins du monde dans un cadre élégant et décontracté.
Où boire un Whisky : Pot Still est une institution à Glasgow. Ce pub établit en 1867 rassemble plus de 700 références de Whisky issus des quatre coins de la planète, à commencer par l’Ecosse bien sûr… !
Comment y aller : En avion, Paris-Glasgow (1h45) avec EasyJet
Consultez les offices du tourisme :
VisitScotland et PeopleMakeGlasgow