Quels défis de la Cité internationale de la langue française ?
C’est un choix hautement symbolique. Le château de Villers-Cotterêts, situé dans l’Aisne (Hauts-de-France), où la Cité internationale de la langue française a été inaugurée le 30 octobre par le Président de la République, est le lieu même où François Ier signa, en 1539, une ordonnance fameuse, qui fit du français la langue de l’administration et du droit en lieu et place du latin.
Ce château exceptionnel, vestige de la Renaissance, a fait l’objet d’une restauration exemplaire. « Grâce au Centre des monuments nationaux, dont le savoir-faire et l’investissement sans faille doivent être salués, tout a été fait pour que ce patrimoine en tout point exceptionnel ne disparaisse pas », souligne Paul Rondin, directeur de la Cité internationale de la langue française.
Un « lieu de mémoire » résolument ouvert sur le monde : c’est tout le sens du projet de cette Cité, premier équipement d’envergure nationale entièrement consacré au français. Son ambition ? Faire vivre notre langue dans toute sa diversité à travers une programmation culturelle ambitieuse.
A Villers-Cotterêts, dans cet « écrin magnifique », « la langue française a enfin trouvé un lieu à sa mesure », s’est félicitée Rima Abdul Malak, ministre de la Culture.
Une offre diversifiée pour parler à tous les publics
Au château de Villers-Cotterêts, le public, amateurs éclairés ou simples curieux, pourra découvrir toute la richesse de l’offre culturelle de la Cité qui fait rayonner la langue française sous toutes ses dimensions. A commencer par le « parcours de visite », conçu sous l’égide de l’académicienne Barbara Cassin, du metteur en scène Hassane Kassi Kouyate, qui dirige les Francophonies de Limoges, de Xavier North, ancien délégué général à la langue française et aux langues de France au ministère de la Culture, et de Zeev Gourarier, directeur scientifique du MUCEM, à Marseille.
Cette programmation raconte l’aventure de la langue française à travers sa culture, son histoire, sa dimension sociale et ses relations avec les autres langues, dans une scénographie originale centrée autour d’un ensemble d’expériences ludiques et participatives.
Un pôle de référence dédié aux technologies de la langue
La Cité internationale de la langue française va être aussi un véritable laboratoire des langues et de la francophonie.
Artistes, chercheurs, pédagogues mais aussi entrepreneurs y viendront en résidence, depuis la France et l’étranger, mener à un bien un projet (de recherche ou de création) en lien avec le français, dont ils présenteront les résultats dans les espaces de la Cité.
Celle-ci, en lien avec de nombreux partenaires, verra naître le Centre de référence français puis européen dédié aux technologies du langage, un incubateur unique en Europe.
Stages, formations, rencontres professionnelles, ateliers et autres cafés pédagogiques vont sans relâche bruisser dans le château, où se croiseront d’un jour à l’autre tels professeurs en formation, enseignant le français à des personnes allophones, tels « apprenants » venus s’approprier la langue, tels professionnels de la lutte contre l’illettrisme et l’illectronisme, venus se rencontrer et se former à l’utilisation de nouvelles ressources dans les espaces partagés de la Cité.
Des jeunes des Hauts-de-France, du Québec, de pays d’Afrique ou d’ailleurs vont profiter des programmes de mobilité, que la Cité organise d’ores et déjà avec ses différents partenaires internationaux, pour partir ou venir renforcer leurs compétences professionnelles et leur employabilité. Des étrangers primo-arrivants, venus à la Cité internationale pourront aussi mettre à profit le programme civique et culturel de leur contrat d’intégration républicaine.
La Cité internationale de la langue française et le château de Villers-Cotterêts, pleinement inscrits dans le territoire
Le château et la Cité internationale de la langue française s’inscrivent au cœur d’un territoire emblématique de l’histoire littéraire et historique de notre pays. Ville de naissance d’Alexandre Dumas, Villers-Cotterêts est une étape de la « Route européenne d’Artagnan » qui bénéficie du label délivré par le Conseil de l’Europe, « Itinéraire culturel européen ».
Villers-Cotterêts est aussi située à 10km de la Ferté-Milon, ville de Racine, à 40 km de Château-Thierry, ville de La Fontaine, à 35 km de Villeneuve-sur-Fère, ville de Paul et Camille Claudel ou encore à 40 km d’Ermenonville où plane encore l’âme de Jean-Jacques Rousseau.
Sans oublier, les châteaux de Pierrefonds, de Septmonts, de Compiègne, de Chantilly, de Condé qui font la richesse patrimoniale du territoire dans lequel la Cité s’inscrit.
Par ailleurs, le château de Villers-Cotterêts prend place dans un patrimoine naturel exceptionnel. Avec plus de 13 000 hectares boisés, la forêt domaniale de Retz a reçu le label Forêt d’Exception, délivré par l’Office national des forêts, qui consacre la qualité de ce massif forestier, mais aussi l’exemplarité des actions menées par les partenaires engagés. Ses hautes et majestueuses futaies sont de véritables cathédrales de hêtres, façonnées par l’homme et perçues comme des dons de la nature. Ses chênes centenaires issus d’une sylviculture héritée de plusieurs générations de forestiers ont fourni en 2021 le matériau de construction d’un vaisseau de la marine royale de Louis XIV, le Jean Bart, suivant des techniques traditionnelles remontant au XVIIe siècle.
Focus Archives nationales
L’ordonnance de Villers-Cotterêts prêtée à la Cité
C’est un texte devenu mythique : l’ordonnance de Villers-Cotterêts. C’est aussi la plus ancienne loi encore en vigueur en France. On admet volontiers qu’elle acte la naissance du français. Plus exactement, le texte ordonne, dans son article 111, la rédaction des actes de justice « en langage maternel françois et non autrement ».
Il s’agissait davantage d’une mesure technique, pour contribuer au désengorgement des tribunaux et à la bonne compréhension des justiciables mais cet acte fera date et sera fondateur.
Ce papier vieux de 484 ans, imprimé en 1539, vestige d’un tirage de 20 000 exemplaires distribués à Paris et en province par le libraire parisien Galiot du Pré, a quitté le lundi 9 octobre les Archives nationales pour rejoindre la Cité internationale de la langue française. Le public pourra examiner ce texte fondateur sous sa vitrine au château de Villers-Cotterêts, jusqu’au mois de janvier, date à laquelle son retour est prévu aux Archives nationales de France.