Interview de Hassane Kassi Kouyaté, metteur en scène du festival des Francophonies en Limousin

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Le festival des « Francophonies en Limousin » fait peau neuve cette année pour devenir « Les Francophonies – Des écritures à la scène ». Le festival nous propose deux festivals de création annuels « les Zébrures d’automne » et « les Zébrures de printemps », ainsi qu’un travail d’accompagnement artistique effectué par le biais de la Maison des auteurs. Hassane Kassi Kouyaté revient sur le projet « généreux » et « fédérateur » dont il est le metteur en scène.

Vous avez été nommé à la tête des Francophonies en 2019. Quelle impulsion artistique souhaitez-vous donner à cette 36ème édition ?

© Christophe Pean

Mon ambition est très claire : je souhaite faire des Francophonies un lieu central et festif proposant à la fois des spectacles, des rencontres, des réflexions et des débats. Pour cela, plusieurs dispositifs sont lancés. Je souhaite par exemple accentuer l’ancrage local de cette manifestation en l’ouvrant avec un spectacle participatif mis en scène par un artiste confirmé, incluant des amateurs de tous horizons issus de la région. La Nuit Francophone, qui clôturera le festival en beauté, verra en outre des propositions artistiques diverses éclorent dans les commerces, les rues et les bars de Limoges le 5 octobre, de 18h à 6h du matin. Cette traversée de la ville au son de la kora constitue un moyen poétique de sensibiliser les différents publics de notre territoire d’implantation aux cultures francophones.

Cette année le festival propose pour la première fois une place au cinéma documentaire, avec la projection des films « Je ne suis pas vivant mais poète », réalisé par Julie Peghini et « Simone et André Schwartz-Bart : la mémoire en partage » de Camille Clavel.

Vous avez ainsi pris le parti de développer la pluridisciplinarité du Festival qui, après avoir été centré sur le théâtre s’est ouvert dans les années 2000 à la musique, au cirque… Et s’apprête désormais à accueillir des œuvres cinématographiques. En quoi cette diversité est-elle un atout ?

La pluridisciplinarité est révélatrice de l’expression francophone aujourd’hui. La francophonie s’exprime de plusieurs manières, au travers de plusieurs disciplines. Le théâtre demeure notre cœur de métier mais il est essentiel que l’on soit à l’écoute des nouvelles formes d’écritures qui émergent. Après tout, les spectacles centrés sur une discipline sont de plus en plus rares.

Tout se mêle, et ce mélange est une richesse. On dit le monde de plusieurs manières, selon le point de vue où l’on se place. C’est cette diversité des narrations, qu’elles soient cinématographique, théâtrale ou digitales, qui m’intéresse. Il me semble important que les Francophonies constituent un lieu où cette diversité puisse exister – un lieu de rencontre pour les hommes, mais aussi les disciplines.

Le ministre de la Culture s’est engagé à renforcer la place de la francophonie dans les politiques culturelles, réaffirmant sa volonté de faire des Francophonies un « pôle de référence » au service de la création francophone. Promouvoir les jeunes talents et faciliter l’émergence d’artistes francophones est, à cet égard, un objectif essentiel…

Limoges doit être à la fois un lieu de création pour les jeunes artistes et un lieu où l’on découvre des talents inconnus. Avec nos deux festivals – « les Zébrures d’automne » et « les Zébrures de printemps » – nous donnons aux créateurs francophones une scène et des milliers de spectateurs, soit un moment de partage unique. A côté de cela, nous accueillons des artistes en résidence dans la Maison des auteurs tout au long de l’année. Composée de trois studios et d’un espace partagé, elle offre un cadre de travail et d’accompagnement propice aux temps de recherche et au tissage des mots. Un créateur aussi emblématique que Wadji Mouawad [dramaturge canadien d’origine libanaise, actuellement directeur du théâtre de la Colline, à Paris] y a, entre autres, commencé sa carrière.

Notre objectif est d’amener à la création, ce qui implique également de chercher et de détecter des talents dans d’autres pays, dans des cultures et des situations géopolitiques différentes des nôtres. Nous suivons donc de près l’actualité politique et artistique à l’étranger, tout en voyageant beaucoup. C’est une mission passionnante et exigeante, même si elle n’est pas toujours aisée.

Justement, le Festival de Limoges a-t-il vocation à s’exporter à l’étranger ? Comment envisagez-vous de favoriser son rayonnement ?

Je suis favorable à ce qu’on puisse irriguer vers d’autres pays, d’autres territoires où le dialogue des cultures inhérent à la francophonie suscite un intérêt particulier. Nous avons ainsi commencé à travailler avec la ville de Pondichéry, en Inde, afin qu’une ou plusieurs éditions des Francophonies s’y tiennent. Des discussions sont également en cours avec l’Espagne et plusieurs pays d’Afrique : le Burkina Faso, le Congo, la Guinée… Il s’agit de déterminer, d’une part, comment ces territoires pourraient être des forces de proposition, de détection d’artistes et d’organiser, d’autre part, la co-réalisation d’œuvres qui circuleraient dans ces différents pays.

En parallèle de ce dialogue international, nous cherchons à nouer de nouveaux partenariats en France. Un certain nombre de directeurs de festivals, de théâtres, de centres dramatiques viendront au festival, à partir du 25 septembre, un premier pas vers une mutualisation plus aboutie de nos forces à l’avenir. Nous comptons en outre développer les actions culturelles et territoriales des Francophonies, qui proposent déjà tout au long de l’année des projets à des centres sociaux, des acteurs de la santé publique ainsi que des associations rurales locales, le tout en co-construction avec des artistes francophones.


Les artistes présents à Limoges pour les “Zébrures d’automne”

Au programme de cette édition des Francophonies, figurent notamment :

  • La pièce de théâtre « Le pire n’est pas toujours certain », écrite et mise en scène par Catherine Boskowitz. Cette œuvre, qui a vu le jour à la MC93 de Bobigny, s’inspire librement de nombreuses lectures dont l’essai Frères Migrants, de Patrick Chamoiseau (Editions du Seuil), le théâtre d’Armand Gatti, de Paul Claudel, les nouvelles d’Antonio Tabbuchi ou encore les écrits d’Hannah Arendt. Elle sera présentée les 26, 27 et 29 septembre au CGM Jean Gagnant de Limoges.
  • Le spectacle de danse « Cercle égal demi cercle au carré », chorégraphié par Chantal Loïa, à découvrir le 28 septembre, à l’Opéra de Limoges. Il mettra à l’honneur les danses créoles traditionnelles et modernes, dressant par la même occasion un vivifiant hommage au métissage artistique.
  • Le « puppet-show man » de Yeung Faï, descendant d’une grande famille de marionnettistes chinois. Eduqué dès l’âge de quatre ans à cet art folklorique traditionnel, l’artiste propose un spectacle plein de poésie et d’humour, avec parfois un petit regard politique sur son pays natal. Cinq représentations au total auront lieu entre le 30 septembre et le 5 octobre au théâtre Expression 7 de Limoges, à la médiathèque de Panazol et à la Mairie d’Eymoutiers.
  • Une performance du chanteur Mangane, venu présenter son tout dernier album, « Lëkkëlo ». Le sénégalais proposera à ses auditeurs une aventure musicale mêlant électro et acoustique – la voix et la guitare sont au cœur de son travail – sur des textes chantés en Wolof. Deux concerts auront lieu, le 29 septembre à la Salle des Fêtes de Saint-Martin-Sainte-Catherine et le 5 octobre à l’Espace Noriac de Limoges.
  • La projection de « Je ne suis pas vivant mais poète », organisée le 29 septembre, à la Caserne Marceau de Limoges. Réalisé par Julie Peghini, ce documentaire donne vie et chaire aux mots de l’écrivain congolais Sony Labou Tansi.

Teaser Les Zébrures d’automne 2019 :

Sources : Ministère de la Culture et les Francophonies

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