Citation – Explication « La fin justifie les moyens »

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Miss Konfidentielle vous propose son premier rendez-vous des citations historiques expliquées. Rapide à lire et facile à retenir, voici une manière de se remémorer ou connaître plus avant nos classiques. Méfiez-vous, les explications des citations ne sont pas toujours celles que nous croyons ! 

« La fin justifie les moyens » 

Cet adage, utilisé afin de justifier l’emploi de tous les moyens, répréhensibles ou non, pour atteindre un but fixé, a longtemps été attribué à Nicolas Machiavel, dont l’oeuvre la plus célèbre, Le Prince, peut en être l’illustration. Le cynisme du texte et la manipulation politique élevée au rang de grand art par son auteur pouvaient expliquer ce choix.

Mais même si l’idée est partout dans cet ouvrage, la phrase n’y apparait pas. Le Florentin n’a pas écrit ses mots.

En fait, l’adage a été inventé par un de ses contemporains, à la toute fin du XVème siècle, et cet autre était Philippe Van den Clyte, seigneur de Commynes. Celui qui avait débuté sa carrière à la cour de Charles le Téméraire et en était devenu le chancelier avait trahi son maître pour préférer son adversaire, le roi Loui XI.

La trahison eut lieu lors de l’entrevue de Péronne, qui devait participer à la paix projetée entre les deux princes. Sauf que Charles de Bourgogne avait appris entre-temps que le roi de France manigançait le soulèvement de Liège contre le duc. Celui-ci envisagea alors de garder le souverain français prisonnier. Mais, sur l’insistance de son chambellan, Charles le Téméraire se contenta d’un traité de paix léonin par lequel Louis XI s’engageait à céder au duc de Bourgogne la Champagne, la Brie et les villes de la Somme. Enfin, punition ultime, le Bourguignon obligeait le roi à assister à l’exercice de sa justice contre les révoltés liégeois, et à crier lui-même : “Vive Bourgogne !” L’humiliation fut immense. Aussi, sitôt libéré, Louis XI n’eut de cesse d’annuler le traité. Puis, parce que la guerre avait repris et que le roi s’était emparé de nouveau de la Picardie, Charles de Bourgogne engagea une contre-offensive. Elle échoua devant Beauvais en 1472. Pour autant, le conflit entre les deux hommes ne s’acheva que cinq ans pus tard, devant Nancy où le duc trouva la mort parmi ses soldats. Quant à Philippe Van den Clyte, il choisit le parti royal après la résolution de l’entrevue de Péronne, et Louis XI fut très reconnaissant envers celui qui lui avait évité un plus grand drame encore. Outre les dons en argent et en terre, il lui offrit la sénéchaussée du Poitou.

Lorsqu’il rédigea ses Mémoires, près de vingt-cinq ans plus tard, autant pour expliquer son geste que pour faire l’éloge de celui qu’il considérait comme le plus grand roi français, Commynes écrivit la phrase. Elle était alors non pas l’expression du plus grand opportunisme, mais l’excuse qui justifiait, devant un geste considéré comme inique du duc de Bourgogne, une action qui le devenait bien moins : la trahison de son serment de fidélité.

Source : Editions du Chêne


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