Miss Konfidentielle est allée à la rencontre de Valérie Dervieux, magistrate, cour d’appel de Paris afin d’échanger sur les sujets qui préoccupent fortement le ministère de la Justice. Il en découle un message que Valérie Dervieux souhaite partager avec vous.
« Je pourrais vous dire…
Je pourrais vous dire que le budget de la justice française et les effectifs de la magistrature sont peu glorieux, comparés à ceux des démocraties européennes.
Je pourrais vous dire que la justice pénale œuvre dans des conditions dégradées, avec des moyens humains, immobiliers, matériels inadaptés mais aussi des applicatifs métiers (logiciels) obsolètes, lents, compliqués, construits sur un traitement de texte qui n’existe plus dans la « vraie vie » (Word Perfect/Corel) et qui « bug » au rythme de ses envies.
Je pourrais vous dire que la justice pénale est basée sur des textes de procédure d’une complexité inouïe, amplifiée par des réformes qui s’empilent, s’enchainent, se succèdent, se contredisent, à un rythme défiant toute concurrence et portées trop souvent par la seule pensée magique de leurs intitulés (efficacité, proximité, liberté, rapidité, modernisation, confiance).
Je pourrais vous dire que chaque jour, chaque nuit, chaque samedi, chaque dimanche, chaque jour férié, des juges de permanence gèrent les contentieux les plus divers : élections, rétention des étrangers, hospitalisation sans consentement, mandats d’arrêts, garde à vue ; mise en examen, autorisations de perquisitions…
Je pourrais vous dire que les 8 000 juges de France sont las de se voir reprocher tout et de son contraire – laxisme, sévérité excessive, rapidité, lenteurs, inhumanité, complaisance, politisation, neutralité hors sol, technicité/proximité insuffisante – et, in fine, déclarés coupables d’appliquer la loi.
Je pourrais vous dire tout cela et bien d’autres choses encore, mais finalement vous le savez déjà.
Alors j’ai envie de vous dire que j’adore un métier qui m’a notamment permis de travailler avec/au contact de fonctionnaires de police et de militaires de gendarmerie.
Alors j’ai envie de vous dire que nous, magistrats, policiers et gendarmes, partageons les mêmes contraintes procédurales, les mêmes manques de moyens.
Alors j’ai envie de vous dire que la seule chaîne pénale qui vaille n’est pas procédurale mais humaine : c’est celle que construisent chaque jour, malgré tout, des femmes et des hommes qui travaillent pour l’intérêt général et la paix dans le respect des règles de notre démocratie.
Alors j’ai envie de vous dire chère Miss Konfidentielle, que vos portraits mêlés, de magistrats, policiers et gendarmes, qui chacune et chacun incarnent la passion, le travail, l’humanité, le dialogue, l’échange et la volonté ancrée de servir, reflètent aussi cela et c’est bien. »
Note importante
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Merci Miss K de laisser, une nouvelle fois, dire…
La vérité, rien que la vérité au plus juste de la réalité, bravo Mme Dervieux et merci pour ce soutien aux forces de sécurité..
Nous sommes tous sur ce bateau France qui ne peut être guidé sans nos institutions qui font de nous celui des droits de l’homme..
Comment ne pas remercier également Miss Konfidentielle toujours aux coeur des préoccupations de notre pays, elle sait mieux que d’autres nous captiver par ses interviews surprenantes..
Merci à vous
Je vous remercie Daniel pour vos commentaires toujours enthousiastes !
J’ai rencontré Mme Dervieux à l´occasion d’une formation sur les violences conjugales puis lors de son passage au parquet de Versailles. Elle est investie avec force et conviction et très abordable.