Interview du GBR Jean-François Valynseele, Commandant la gendarmerie de l’Air
Le 29 mai 2023 – Formation spécialisée de la Gendarmerie nationale, placée pour emploi auprès du chef d’état-major de l’armée de l’Air et de l’Espace, la gendarmerie de l’Air fête ses 80 ans le 1er juin 2023 ! Alors direction la BA 107 à la rencontre du GBR Jean-François Valynseele, commandant la gendarmerie de l’Air pour lui poser des questions intéressantes.
Bonjour Jean-François,
Bonjour Miss Konfidentielle,
Je vous souhaite tout d’abord la bienvenue sur la base aérienne 107 de Villacoublay au commandement de la gendarmerie de l’Air et je vous remercie de votre visite et de votre intérêt pour la gendarmerie de l’Air. C’est un honneur pour nous.
Nous sommes à J-3 d’un événement historique pour la gendarmerie de l’Air. De quoi s’agit-il ?
Effectivement ce 1er juin se déroulera ici à Villacoublay, une cérémonie militaire organisée spécialement à l’occasion des 80 ans de la gendarmerie de l’Air, cérémonie qui sera parrainée par le chef d’état-major de l’armée de l’air et de l’espace et le directeur général de la gendarmerie nationale.
2023 est donc une année particulière pour la gendarmerie de l’Air, et effectivement à cette occasion nous portons cette année le même écusson sur la manche. Il a été réalisé par un gendarme de l’Air parmi plusieurs projets proposés l’année dernière. Le choix s’est porté sur cette rondache, les couleurs bleu, banc, rouge, rappellent le drapeau français, l’avion, notre rattachement à l’armée de l’air et de l’espace, la carte du monde rappelle notre présence partout, en métropole, outre-mer ou à l’étranger affectés ou en OPEX (opération extérieure).
Qu’est-ce que la gendarmerie de l’Air ?
La gendarmerie de l’Air a officiellement été créée pendant la seconde guerre mondiale, exactement le 15 septembre 1943 par le comité français de libération nationale. Pour autant, avant 1943, des gendarmes étaient dèjà mis à la disposition de l’armée de l’Air pour sécuriser les aérodromes.
Comme je vous l’indiquais lors de notre prise de contact, la gendarmerie de l’Air est ainsi une formation spécialisée de la gendarmerie nationale qui oeuvre pour l’armée de l’Air et de l’Espace.
Avec 80 ans, c’est une jeune gendarmerie en rapport à l’histoire des 800 ans de la gendarmerie nationale. Placée pour emploi auprès du chef d’état-major de l’armée de l’air et de l’espace, les gendarmes de l’air sont rattachés au ministère des armées alors que nos camarades de la gendarmerie départementale, de la gendarmerie mobile et de la garde républicaine appartiennent au ministère de l’Intérieur.
J’ai coutume de dire que la gendarmerie de l’Air est un modèle hybride avec des valeurs et une formation de gendarme, employée au profit et dans l’environnement de l’armée de l’air et de l’espace. Il faut donc s’approprier la mission et la culture de l’aviateur.
D’ailleurs, comme vous le voyez dans mon bureau, apparaissent à la fois les photos du général Christian RODRIGUEZ, Directeur général de la Gendarmerie nationale (DGGN) et du général Stéphane MILLE, Chef d’état-major de l’armée de l’Air et de l’Espace (CEMAAE).
Pour se fixer un cap à tenir, je dis souvent, que le gendarme de l’air, dans son métier de gendarme, doit être une plus value pour l’armée de l’air et de l’espace, et en même temps qu’il doit pouvoir apporter ses expertises spécifiques “air” à la gendarmerie.
Sur le plan missionnel, globalement, la gendarmerie de l’Air a pour mission de participer à la protection des emprises de l’armée de l’air et de l’espace, d’assurer sur les bases les missions de police militaire, de conduire les enquêtes judiciaires, d’assurer les escortes des convois routiers sensibles, d’assurer la protection et la conduite de hautes autorités militaires.
Elle assure également la mission de gardes frontières sur les bases aériennes certifiées point d’entrée Schengen.
Enfin, la gendarmerie de l’Air est compétente pour mener les enquêtes judiciaires ouvertes suite à des accidents ou incidents d’aéronefs militaires, quelque soit l’armée d’appartenance de l’aéronef militaire, armée de l’Air, armée de Terre, Marine nationale et Gendarmerie nationale.
Voilà dans les grandes lignes, le rôle de la gendarmerie de l’Air en 2023.
Nous avons évoqué la date des 80 ans de la gendarmerie de l’Air. Qu’en est-il des garde-frontières au regard de la Coupe du monde de Rugby et des JO 2024 ?
La mission de garde-frontières de la gendamerie de l’Air est assurée sur les bases aériennes certifiées point de passage frontalier, Orléans, Istres, Vélizy-Villacoublay.
Sur ces bases, les gendarmes de l’Air assurent les missions assurées par la police aux frontière sur les aéroports civils.
Concrètement quel est l’intérêt du dispositif ?
C’est très simple, cela permet aux militaires étrangers, ressortissants hors Schengen d’entrer en France en se posant directement sur la base aérienne. Concrètement un pilote américain ou anglais par exemple qui vient participer à un exercice ou un meeting pourra directement entrer en France en se posant sur la base aérienne.
Je précise que c’est la base aérienne, en l’occurence, les bases de Villacoublay, Orléans et Istres qui sont certifiées. Les standards Schengen y sont donc respectés. Il est ainsi fort probable que les bases militaires soient sollicitées notamment pour l’accueil d’autorités à Villacoublay tant lors de la prochaine coupe du monde de rugby que durant les jeux olympiques 2024.
Pas plus tard que la semaine dernière, le dispositif a été mis en place à Istres et Salon de Provence à l’occasion du meeting des 70 ans de la patrouille de France. Ainsi, tous les pilotes des patrouilles étrangères qui ont participé à ce meeting sont entrés en France par une base aérienne et ont été controlés par des gendarmes de l’Air lors de leur entrée sur notre pays.
➡ Des précisions de Miss K : Focus sur Frontex – l’agence européenne de garde-frontières et de gardes-côtes.
Si je vous dis que la Gendarmerie nationale est un ascenseur social pertinent.
Que me répondez-vous ? Quelles ont été vos motivations ? Quelles sont les étapes marquantes de votre parcours ?
Fils d’un sous-officier de gendarmerie et d’une mère ouvrière, je suis rentré au lycée militaire d’Autun à 15 ans. J’ai ensuite démarré ma carrière à 19 ans en m’engageant comme élève sous-officier à Saint-Maixent. Après 10 ans dans l’armée de Terre comme sergent puis lieutenant, j’ai rejoint la gendarmerie à 29 ans comme capitaine. La gendarmerie m’a offert de nombreux postes à responsabilité et m’a permis de gravir de nombreux échelons.
Je pense donc effectivement que la gendarmerie est un bel ascenseur social, où chacun a sa chance quelque soit ses origines, son niveau d’études ou son école de recrutement initial.
Tout petit à la brigade, je souhaitais devenir gendarme.
Je pense que mes parents nous ont transmis à mes frères et à moi, des valeurs de service public, sans nous pousser vers un métier précis.
Pour autant, j’ai été marqué par la vie de mon père en escadron et en brigade dans les années 70-80. A l’époque, les enfants montaient dans la jeep de l’escadron avec le gendarme qui faisait le tour de la caserne pour sortir les poubelles, puis à la brigade, on vivait tous ensemble, les gendarmes n’avaient qu’un jour de repos par semaine et pas de quartier libre, on vivait tous ensemble, je me souviens d’un jour où le planton avait récupéré les enfants pour charger dans l’estafette les panneaux triflash et les cones de lubec pour partir sur un plan de recherches malfaiteurs.
Au final, j’ai un frère sous-officier dans la gendarmerie et un frère pompier professionnel, et mon fils est lui même sous-officier en brigade de gendarmerie.
Ce que je retiens de mon parcours aujourd’hui, c’est bien sur les étapes marquantes que sont les réussites aux concours mais principalement l’exercice du commandement avec les temps forts opérationnels vécus sur le terrain (Opex à Sarajevo..), je garde surtout en mémoire toutes les riches rencontres avec les personnels dont on m’a confié à un moment donné le commandement et avec qui j’ai vécu des moments inoubliables, le chef sans ses personnels ne peut rien, il faut être reconnaissant de l’engagement de chacun.
Quelle est votre action au quotidien à la gendarmerie de l’Air ?
Implantée sur près d’une quarantaine de sites en métropole, outre-mer et à l’étranger, la gendarmerie de l’Air dispose d’un effectif de plus de 800 militaires d’active et près de 200 réservistes opérationnels.
A l’image, de toute la gendarmerie nationale, elle est en perpétuelle évolution pour offrir une prestation de sécurité à l’armée de l’Air et de l’Espace en adéquation aux enjeux actuels de la société.
Mon action est forcément liée à ma fonction de commandant de la gendarmerie de l’Air.
Il y a bien sûr le suivi et la gestion des événements opérationnels, comme par exemple la mise en place du dispositif de sécurisation du meeting organisé à l’occasion des 70 ans de la patrouille de France le week-end dernier.
Je gère principalement la formation administrative afin d’obtenir un fonctionnement optimal dans le domaine des ressources humaines et sur les plans logistique et financier.
Gestionnaire RH des militaires de la gendarmerie de l’Air, je m’efforce de répondre individuellement à la situation de chacun tant sur le plan de la mobilité géographique, de l’avancement et du parcours de chacun, et de veiller à accompagner au mieux les militaires en difficulté. C’est un véritable métier qui nécessite écoute et dialogue, ce qui est le sens même du commandement, et ce qui est donc passionnant.
➡ Des précisions de Miss K : Carte d’implantation GAIR avec numéros de bases
Je consulte les murs de votre bureau et je découvre vos centres d’intérêt dont une photo de Louis de Funès. Pourquoi votre intérêt pour Louis de Funès ?
Tout petit je vivais déjà à la brigade, c’était l’époque des gendarmes en méhari verte ou en estafette noire, avec des tenues beige en été. Bref, tout ça était bien imagé par Louis de Funès dans son rôle de gendarme de Saint-Tropez avec un côté bien caricatural mais si attachant, et toujours dans le souci de protéger, sécuriser et assurer l’application de la loi.
Naturellement je suis devenu un fan de Louis de Funès, d’abord avec la série des gendarmes puis l’ensemble des films de Louis de Funès, je pense bien sûr à la grande vadrouille, la folie des grandeurs avec le célèbre Don Salluste, Rabbi Jacob, la série des Fantomas avec cette fameuse réplique « I am sure mais alors, I am tout à fait sure que c’est un coup de Fantomas » ….
Il y a une quinzaine d’années une de mes filles m’avait offert naturellement ce portrait de Louis de Funès qui depuis trône toujours dans un coin de mon bureau.
Et quels sont votre autres loisirs de prédilection ?
S’agissant de mes loisirs, ils ont évolué avec le temps.
Je fais toujours du footing même si je cours beaucoup moins vite qu’il y a 30 ans.
J’ai à une époque pratiqué le rugby, le football, l’équitation.
Aujourd’hui, je consacre du temps à restaurer une ancienne ferme dans le Jura et à m’occuper de mes 4 petits-enfants, un nouveau mais tellement beau métier !
Un remerciement pour l’accueil sympathique du général entouré de son équipe et une dédicace à Catherine Cougard, en charge de la communication de la gendarmerie de l’Air qui a pris le soin d’organiser la rencontre avec visite sur site.
Rendez-vous le 1er juin sur la base aérienne de Villacoublay « sous-lieutenant René Dorme » dirigée par la colonel Géraldine Borrel, que j’ai eu l’honneur d’interviewer le 14 mars 2023.
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