Le Plan rouge vif, c’est quoi ?

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🔴 Alors que je publie le 25 janvier 2024 l’interview croisée de Gwenola JOLY-COZ et Eric CORBAUX, chefs de la cour d’appel de Poitiers sur les violences intrafamiliales (VIF),

Alors que Madame Emilie CHANDLER annonçait le 23 janvier « La commission des lois de l’Assemblée Nationale adopte ma proposition de loi ! Dans la continuité de mon PlanRougeVIF, cette proposition de loi vise à allonger la durée de l’ordonnance de protection et créer l’ordonnance provisoire de protection immédiate. Les violences intrafamiliales sont l’affaire de tous. Je me réjouis de cette adoption qui crée un nouveau dispositif pour lutter concrètement contre les violences conjugales en protégeant de manière immédiate les victimes. Rendez-vous la semaine prochaine pour l’examen final dans l’hémicycle ! »,

J’apporte des informations complémentaires en amont issues du Rapport parlementaire Le plan rouge vif – Améliorer le traitement judiciaire des violences intrafamiliales, présenté par Madame Émilie CHANDLER, députée du Val-d’Oise, et Madame Dominique VÉRIEN, sénatrice de l’Yonne. 

Une dédicace spéciale à Madame Isabelle Rome qui a beaucoup fait et depuis fort longtemps dans le cadre de la lutte contre les violences faites aux femmes et que j’ai eu l’honneur de rencontrer, en particulier dans le cadre des interviews de Miss Konfidentielle et de conférences de Femmes de Justice

« La prévention et la lutte contre les violences conjugales et la violence domestique sont au centre des préoccupations politiques et sociétales depuis les années 2000. L’enquête nationale sur les violences envers les femmes en France (ENVEFF) réalisée en 2000 a en effet permis une prise de conscience de la réalité de ce phénomène et a été alors suivie de différents plans de lutte. Cette mobilisation s’est traduite par plusieurs textes de loi.

En 2013, était par ailleurs créée la mission interministérielle pour la protection des femmes contre les violences et la lutte contre la traite de êtres humains (MIPROF) placée sous l’autorité de la ministre chargée des droits des femmes.

Au niveau européen, le conseil de l’Europe adoptait en 2011 la convention sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique, dite convention d’İstanbul.

La lutte contre les violences faites aux femmes ayant été déclarée grande cause nationale du quinquennat par le Président de la République le 25 novembre 2017, ce mouvement s’est amplifié avec l’organisation du 3 septembre au 25 novembre 2019 d’un Grenelle contre les violences conjugales, associant l’ensemble des partenaires et permettant depuis une mobilisation inédite des acteurs publics et associatifs.

Le Grenelle a abouti à 54 mesures dont 46 sont effectives et 8 sont en cours de réalisation concernant pour certaines l’autorité judiciaire, notamment :

  • mettre en œuvre une filière de l’urgence de traitement judiciaire des violences au sein du couple,
  • soutenir le déploiement et encourager l’attribution des téléphones grave danger,
  • encourager et faciliter le recours à l’ordonnance de protection,
  • instaurer au civil ou au pénal, y compris en pré-sentenciel, la mise en place d’un bracelet anti-rapprochement,
  • renforcer les formations pluridisciplinaires de proximité et introduire un volet concernant la lutte contre les violences au sein du couple dans les formations obligatoires au changement de fonction,
  • améliorer la protection des enfants par une possible remise en cause de l’exercice de l’autorité parentale du conjoint violent,
  • favoriser le recours aux espaces de rencontre et développer les dispositifs d’accompagnement protégé,
  • effectuer des retours d’expérience sur les homicides conjugaux,
  • améliorer le suivi des auteurs de violences conjugales et expertiser la possibilité de développer des solutions d’hébergement,
  • réunir l’ensemble des comités locaux d’aide aux victimes au format « lutte contre les violences conjugales ».

Sur le seul plan normatif, plusieurs lois et décrets sont venus renforcer les outils de lutte contre les violences intrafamiliales, relayés par de nombreuses circulaires et dépêches ainsi que des outils à destination des juridictions.

Le développement de la politique de lutte contre les violences conjugales n’a cependant pas à ce jour eu un impact significatif sur l’ampleur du phénomène. Le nombre de victimes de violences conjugales est ainsi en augmentation passant de 152 981 en 2019 à 207 600 en 2021 (dont un quart pour des faits antérieurs à 2021). Les homicides, après avoir connu une baisse en 2020 pour être de 125, ont connu une augmentation à 143 décès en 2021, dont 122 femmes et 21 hommes. Les tentatives d’homicides au sein du couple ont été recensées à hauteur de 251 en 2021. Ces éléments statistiques ne sont cependant pas que le reflet d’une politique insuffisante : la hausse du nombre des plaintes s’inscrit également dans une libération de la parole et une plus grande visibilité du phénomène, ainsi que dans une forme de prise de conscience de la gravité de ces faits par la société.

Mais ces chiffres viennent néanmoins dire le chemin qui reste à parcourir pour mieux assurer la protection de la victime et des membres de la cellule familiale et pour prévenir la récidive.

Dans ce contexte, Elisabeth Borne, Première ministre, a confié à Émilie Chandler, députée, et Dominique Vérien, sénatrice, une mission portant sur le traitement judiciaire des violences intrafamiliales. Il est ainsi demandé de « faire un bilan des actions mises en œuvre et des résultats de la politique menée et de formuler toutes préconisations utiles permettant de concilier l’exigence de spécialisation des acteurs de justice avec la nécessaire agilité des organisations liées à la diversité des ressorts judiciaires ».

La mission parlementaire entend les violences intrafamiliales (VIF) comme étant les violences conjugales au sein du couple mais également les violences subies par tous les membres de la cellule familiale, principalement les enfants. Il s’agit donc d’avoir une approche de la cellule familiale dans le contexte de violences conjugales. Il n’existe pas une définition juridique des violences conjugales. La peine encourue pour des faits de violences, physiques, psychologiques, sexuelles, est aggravée dès lors qu’ils sont commis par le conjoint, le concubin, ou le partenaire lié à la victime par un acte civil de solidarité. La loi n°2010-769 du 9 juillet 2010 a étendu la circonstance aggravante aux faits « commis par l’ancien conjoint, l’ancien concubin ou l’ancien partenaire lié à la victime par un Pacte civil de solidarité. Les dispositions du présent alinéa sont applicables dès lors que l’infraction est commise en raison des relations ayant existé entre l’auteur des faits et sa victime ».

 

En outre, le décret 2021-1516 du 23 novembre 2021 prévoit que les mineurs ayant assisté aux violences peuvent se constituer partie civile. Ainsi, sur le plan procédural ils sont considérés juridiquement comme victime et non témoin (D 1.11.1 CPP).

Dans une volonté d’avoir une vision systémique du traitement judiciaire des VIF, il a été fait le choix de débuter le parcours de la victime, à partir du moment où elle s’autorise à parler ou engager une procédure par le dépôt de plainte ou la saisine du parquet suite au constat de l’infraction avant le dépôt de sa plainte et d’étudier également la prise en charge des auteurs, comme essentielle à la prévention de la récidive. »

La photo en Une (franceinfo) : La député Renaissance du Val-d’Oise Emilie Chandler, à gauche, aux côtés d’Isabelle Rome, ministre déléguée à l’Egalité entre les femmes et les hommes, à la Diversité et à l’Égalité des chances, Eric Dupond-Moretti, garde des Sceaux, et Dominique Vérien, sénatrice UDI de l’Yonne et co-autrice du rapport © ALAIN JOCARD / AFP

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